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 Points de suspension

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AuteurMessage
Jörgen O'Brian
● Magic Touch ●

Jörgen O'Brian


Nombre de messages : 92
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Avatar : Jugette
Date d'inscription : 20/01/2010
Coup de coeur : 85
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MessageSujet: Re: Points de suspension   points de suspension - Points de suspension - Page 2 Icon_minitimeDim 5 Sep - 11:32:52

Dans ce dernier instant qui appartiendrait bientôt à leur ancienne vie, Jörgen porta la main de Toni à ses lèvres et effleura doucement la base de son annulaire.
Il la repoussa ensuite à peine moins doucement que prévu. Ils avaient déjà sacrifié trop de leur intimité à l'usurpateur.
Enfila une chemise, moins par pudeur que pour se donner le sentiment de se préparer à son affrontement.
Se mit debout, face à Toni, poings rentrés au fond des poches. Tout se terminerait et tout commencerait sous peu. Il s'agissait de ne pas faire la moindre erreur de jugement, la moindre erreur tout court. Bannir les lapsus, les tics, tout ce qui pourrait les trahir à ses yeux. Il n'avait jamais été comédien. Autant piocher dans ses souvenirs d'enfance quand il s'agissait de faire une blague à sa mère. Même alors, James était le plus doué pour ce genre d'exercice.

Ils avaient répété quoi dire, comment le dire. Tout se passerait bien.

Déjà, quelque chose en Toni se transformait. Se froissait. S'hybridait.
Le Clover reconnut cet air avant même que Bruno ne parle. Il avait abandonné, dans l'ensemble, les "usurpateurs" et autres "belliqueux" mais n'arrivait pas à poser le nom d'Antarès sur la chose. Il lui semblait que s'il commençait à utiliser ce patronyme, il ne pourrait plus s'arrêter et c'était la gaffe assurée. Pourtant, il était presque persuadé que Bruno en serait... non, pas amusé. Mais qu'il trouverait là un nouveau moyen de faire pression, de les faire chanter, ou pire. L'imagination de ce type était sans limite, et n'avait d'égale, sans doute, que sa perversité. Leur offrit une telle alternative, alors, que, deux jours plus tard, il proposait au monde la libération des Soumis pour peu que le monde opine gentiment du chef à ses désirs. Lâchement, Jörgen avait voté "oui". Peut-être par naïveté. Ou peut-être simplement parce que quelque chose lui disait qu'un oui ou un non ne changerait pas grand chose à leur situation. Bruno ne lâcherait sans doute pas si facilement l'opportunité qui lui était offerte. Au final, si le "oui" l'emportait, c'était peut-être leur "tâche" qui s'en trouverait facilitée. Pas que le... le meurtre... il n'arrivait qu'à grand peine à s'avouer le mot dans un coin de sa conscience alors le mettre en pratique... plus tard... il verrait plus tard... le meurtre ne s'en trouverait pas pour autant devenu banalité mais les recherches et la traque, sous couvert de libre-circulation... Peut-être que, finalement, il avait voté "oui", tout simplement parce qu'un oui ou un non ne changerait pas la façon dont son univers se heurtait aux parois du monde.
Bruno était là, il le devinait aux confins des prunelles de Toni. Il se maîtrisa du mieux qu'il put, confina sa rage et son mépris bien au fond, de façon à ne pas les laisser interférer, et fixa son regard à celui de l'intrus. Il y devinait encore la Gryffondor et cette cohabitation était peut-être encore plus troublante que ne l'avait été l'invasion de la dernière fois.

* Cette fois-ci, c'est vraiment la dernière. *

Jörgen, je suis ravi de vous retrouver.

Tout le plaisir était pour lui. Le jeune homme afficha un sourire contrit qui masquait comme il le pouvait ce que lui inspirait une telle entrée en matière.

- Il me semble que vous me devez une réponse.

Oui. Ils devaient.
A son échelle infinitésimale, Jörgen lui offrit une petite dose de frustration en laissant s'éterniser son silence. L'anticipation, certes, habilement dissimulée, qui perçait dans son ton méritait bien un petit délai. Le Clover le soupçonnait de connaître très exactement la teneur de sa réponse et de se jouer d'eux à peine plus longtemps, tant qu'il le pouvait encore. C'était la base de sa propre interprétation, sans doute parce que, si les situations avaient été inversées, c'est ainsi que lui aurait agi. Ca n'était jamais une bonne idée de jouer à l'empathie dans ce genre de vis-à-vis. Surtout le genre en question était le pire tyran depuis Voldemort et était en passe, à sa façon, de dépasser le maître.
Il fit donc mine d'hésiter, de chercher ses mots, avant de le fixer à nouveau, par le biais de Toni.

- Nous acceptons votre proposition.

Ici et maintenant.

- Je serais un Opposant d'Antarès et Toni sera ma... ma...

Rien à faire, ça ne sortirait pas.
Elle ne serait plus sa Soumise à lui et c'était tout ce qui comptait.

- Il faudra trouver une autre nounou pour votre fille.

Inspiration personnelle.
Si seulement ces quelques mots pouvaient provoquer chez Bruno une image, un indice, un quoi que ce soit que Toni soit à même de capter et qu'ils puissent à leur tour utiliser contre lui. Tous les coups étaient permis pour se défaire du joug qu'il leur imposait. Même si l'idée de l'esprit de la jeune fille étroitement mêlé à celui du maître Opposant suscitait chez lui un malaise qu'il s'efforçait d'envoyer aux oubliettes.
Il se permit une vague moue qui pouvait dire tout et son contraire et qui était supposée faire glisser sa petite pique comme de rien.

- Vous avez fait le bon choix.

Sans blague.
Comme si l'alternative était un choix en soi...
Quelque chose se transforma dans le visage de Toni. Un contentement maîtrisé, sans qu'il sache si la retenue venait de la jeune femme qui gardait un contrôle sur ses gestes et expressions ou de Bruno qui refusait de laisser ses véritables intentions et émotions remonter à la surface. Le ton était plus détendu, pourtant, quand il reprit la parole.

- Vous savez... L'Opposition ce n'est pas seulement quatre ans de batailles, c'est quatre ans de bataille pour une nouvelle façon de vivre. Certes, certains choix peuvent paraître extrêmes mais c'est pour servir l'évolution.

Blablabla.
Est-ce qu'il était supposé prendre un air convaincu? Non. Il se contenta d'écouter, certain que, quelles que soient les circonstances, pourvu qu'elles aient été autres, il n'aurait jamais rallié l'Opposition. La Résistance non plus, à dire vrai.

- [...] L'Histoire est faite de batailles et de conquêtes.

C'était plus ou moins de la paraphrase de son discours du 21 juin.

- Bien. Il ne nous reste plus qu'une petite formalité.
- Libérez d'abord Toni.
- C'est que...
- Je ne serais un Opposant que lorsque Toni ne sera plus votre Soumise. C'était le marché.

Si, jusqu'ici, Jörgen lui avait donné l'impression d'être quelqu'un de docile, qui oscillait de la tête et marquait son approbation en silence, il était maintenant têtu et ne démordrait pas. Que les choses soient bien claires, il n'acceptait le package deal que pour cette seule et unique raison. Il en avait passé des nuits blanches à tourner le problème dans tous les sens et la solution avait fini par lui apparaître. Elle n'était pas de lui, elle était alambiquée et promettait de belles prises de tête. Mais il pourrait vivre avec cette option. Savoir Toni libérée de ce joug devrait lui suffire. Lui suffirait. Le reste, il pouvait toujours composer avec.
Bras croisé, mine obstinée, il attendit, fixant Toni, et, au-delà, Bruno. Il tiendrait, ne lâcherait pas.
L'autre finit par céder, ou peut-être cela n'avait-il aucune importance pour lui, ce déroulement des événements pour peu qu'ils en arrivent à la conclusion qu'il leur avait choisi.
Des lèvres de Toni s'éleva une litanie dans une langue qui était inconnue à l'Irlandais. Il essaya d'en capter des mots, d'en saisir le sens. Peine perdue.
Enfin, après un temps qui lui paraissait interminable, à laisser vagabonder son imagination, à imaginer des options impossibles, à craindre le pire, à prendre conscience de son manque total de contrôle sur la situation, la voix s'éteignit. C'était fait. Lui ne sentait aucune différence.
Il fit deux pas, s'agenouilla devant Toni. Le bracelet était toujours là. Le prenant à deux mains, il le rompit. Entre ses doigts, le bijou paraissait avoir perdu tout son sens. Ca n'était plus qu'une petite chose brisée, sans but et sans espoir, sans sens. Il lui paraissait tellement étrange qu'une vie puisse être régie par un objet aussi ridiculement petit et fragile. Aussi... dérisoire. Dérisoire. Il le laissant choir au sol, comme Bruno avait détruit le médaillon de Ellsworth. Ce faisant, il avait caressé l'espoir fou, l'espace d'un millième de secondes, d'avoir détruit le lien qui unissait le parasite à sa Toni. Mais à l'évidence, le bracelet n'était pas une antenne. Oui, pendant l'espace d'un millième de secondes, il avait croisé le regard de Toni. Elle lui avait paru tellement elle, avec un quelque chose au fond des yeux, au bord des lèvres, qui était tellement elle. Seulement elle. Entièrement elle. L'impression, fugace, s'était enfuie aussi vite qu'elle était venue. Il était encore là, en périphérie. Un an de soumission devait laisser ses traces. Il ne saurait jamais quelle expression il avait affiché à ce moment précis mais Toni en avait un moment repoussé l'intrus au loin, pour lever une main vers lui et lui effleurer le visage du bout des doigts. Un "ça va aller, regarde". Elle avait toujours été plus forte que lui.

Il rappela sa présence par un petit raclement tout à fait hors de propos.

- Bien. Ceci état fait... c'est votre tour, Jörgen. La marque.

La... Marque?
Il avait dû oublier une étape dans comment devenir un parfait petit Opposant. Il ne suffisait donc pas de se vendre?

- La marque d'Antarès. Son scorpion.

Il fallait donc afficher au grand jour ses couleurs? Un engagement à l'encre indélébile. Opposant ad vitam eternam. Marqué comme un pion.
Jörgen pâlit. Ne dit rien.
Se faire tatouer en direct live en signe d'allégeance. Génial.
Enfin:

- Toni...

*Dis-moi. Choisis. Décide.*

Du regard, il mit Bruno au défi de refuser, Toni d'accepter et lui-même de ne pas se rétracter avant qu'il ne soit trop tard.
L'éclair qui transforma le visage de la Gryffondor était définitivement schefferien, une subtile composition de regret, de mea culpa, d'amour et de fierté. Cette même main qui avait quitté sa joue se suspendit de nouveau en l'air, hésitante, tandis que leurs yeux devenaient un melting pot émotionnel. Ses doigts dégringolèrent son ventre, s'arrêtèrent à la frontière de son jean, glissèrent encore un peu, déviant vers sa gauche à elle pour s'appliquer sur l'aine.

- Nous sommes prêts.

Ou peut-être pas.
On ne pouvait jamais réellement se préparer à la douleur, quand bien même celle-ci fut fugace. Un fer rouge appliqué et aussitôt retiré. La brûlure irradia autour de l'épicentre pour se diffuser dans tout son corps, perdant de son intensité en gagnant les extrémités. Après, la sensation demeura, comme si le centre de la douleur était devenu sourd mais que les sens, eux, se souvenaient. Puis, tout reflua. Plus rien, pas même un tiraillement. Ca n'était pas si terrible, finalement, songea Jörgen en redressant fièrement les épaules. Ca n'était rien comparé au reste. Face à lui... Toni et Bruno, prisonniers d'un même corps. Il n'aurait jamais pensé qu'un visage, qu'un corps puisse être à ce point en contradiction avec lui-même, un mélange de douleur, de rancune tournée vers soi-même, d'auto-glorification et de satisfaction.
Ignorant le tout du mieux qu'il put tellement le spectacle était dérangeant, il envoya sa main gauche enquêter dans une de ses poches. Il était temps d'en finir. Le plus difficile étant devant lui. Il aurait tout donné, tout, ou presque, pour ne pas avoir à accomplir cela, quand, au fond de lui, quelque chose était impatient de le faire. Il tira de la poche de son jean un petit sachet de velours. En son sein, reposait un nouveau bracelet, en argent, parsemé de breloques. Une petite pierre de lune, un Shamrock, une croix Ankh, un petit dragon. Ses mains effleurèrent la cheville de Toni, doucement, demandant pardon pour l'offense à venir. Après un temps, la petite chaîne en argent finit par se refermer sur elle-même, tandis que Jörgen répétait les paroles de Bruno. C'était un chant à trois, macabre et funeste.
C'était fait.
Une crampe au coeur.

- Je sais de source sûre qu'Esadora Carter sera dans l'état de Washington à partir du 1er juillet. Elle devrait y rester une quinzaine de jours. Pour vous permettre d'accomplir cette première mission, jeune Jörgen O'Brian, je vais faire quelque chose que je permets rarement - mais je place beaucoup d'espoir dans notre petite association -, je vais vous nommer directement Dschubba et selon l'efficacité dont vous ferez preuve, suite à cette première collaboration, je vous ferai Shaula. Vous apprendrez les grades et je serai particulièrement honoré d'être votre alpha. Cela vous ouvrira quelques portes dans les RUOs et vous serez votre propre chef. On vous donnera les moyens de réussir dans votre mission. Je me réserve le droit de punir tout manquement, toute trahison et tout laxisme en prenant purement et simplement la vie de votre Soumise au moindre écart. Sommes-nous d'accord ?

*Parce que j'ai le choix?*

Jörgen n'était pas sûr d'avoir compris l'essentiel de ce court monologue, pas plus qu'il n'était sûr d'aimer ce qu'Antarès faisait glisser dans la voix de Toni. Pourtant, il hocha la tête, en signe d'approbation. Parce que la fin de son discours aurait suffi à le convaincre d'accéder à n'importe laquelle de ses requêtes.

- Bien.

Il y en avait au moins un pour se réjouir. Il était à parier que jamais, ils ne parviendraient à être satisfaits de concert. C'en était presque à espérer.

- Un dernier détail, cependant, avant de vous quitter. Il va sans dire que vous avez un certain délai pour effectuer cette mission. Votre ultimatum est le 31 août. Passée cette date... Mais vous réussirez, j'en suis certain.

Deux mois pour devenir des assassins. Une éternité. Une seconde.
Une fois de plus, le Clover se contenta de hocher la tête, ses lèvres scellées devant l'impossible.
L'intrus s'exprima encore brièvement. Puis le silence. Pesant. Immense. Enfin.
La voix de Toni comme un filet.

- Il est parti.

Parti.
Un sourire léger comme un apaisement.

- Tu as peur?
- Non. Et toi?
- Non plus.


Génial. Ils crevaient de peur tous les deux.
L'éclat du bracelet qui ornait à présent la cheville de Toni lui brûla les yeux. Sur son visage, quelque chose se brisa. Sa coquille d'assurance se fêla et sa main tremblait quand il voulut toucher Toni. Ce fut qui la porta jusqu'à sa joue. Elle encore qui l'attira contre elle.


¤ Hide - Only T. ¤



Faire l'amour avec elle avait été inévitable. Une nécessité. Tout aussi inévitable était le besoin de s'envoler loin de Poudlard. Le château dormait encore quand ils s'esquivèrent, quelques affaires pour tout bagage. Une fois l'enceinte de l'école franchie, il arrima Toni à lui et ils disparurent dans un tourbillon.
Le soleil se leva sur une étendue verte qui s'étendait jusqu'à l'horizon, parsemée de quelques arbres. Un petit bout d'Irlande qui ignorait jusqu'à l'existence du mot "guerre". Un peu plus loin, sur leur droite, sous le couvert de quelques hêtres, une petite maison en pierre se dressait, couverte de lierre et usée par le temps. Un cairn se dessinait près de l'entrée. Jörgen désigna l'ensemble du doigt et Toni l'entraîna dans cette direction, toute curiosité dehors. Les gonds de la porte en bois grincèrent légèrement, ce qui ajoutait du charme à l'endroit. L'intérieur de la bâtisse était la preuve qu'il ne fallait pas se fier aux apparences. La magie avait été mise à l'oeuvre dans cette pièce unique, c'était d'une évidence rare. L'endroit était spacieux et d'une propreté qui résistait au passage du temps. Une odeur familière, venue de loin, assaillit Jörgen à le faire sourire. Ils ne restèrent que le temps de laisser leur maigre bagage échoir sur le lit qui faisait l'angle. Pour le reste, ils auraient du temps plus tard. Quarante-huit longues heures que le transplanage avait à peine grignoté.
Sa main dans la sienne, Jörgen traîna Toni dehors en expliquant rapidement:

- Je venais ici quand j'étais gosse. Mon cousin Seamus nous embarquait tous les trois, avec James et Jupiter, pour passer une après-midi ou quelques jours.

C'était peut-être les souvenirs les plus heureux de son enfance, loin de sa famille envahissante et de l'agitation sans fin de l'auberge. Le calme et le silence avaient toujours été ses compagnons de jeu préférés. Et ici, mieux qu'ailleurs, le silence confinait au sacré.
Seamus, de dix ans leur aîné, avait toujours été son cousin favori, celui auquel il s'identifiait et auquel il songeait quand il se retrouvait face à un dilemme (*Voyons... que ferait Seamus?*). Seamus, toujours là pour eux, pour lui, même, peut-être un peu plus. Seamus qui était aujourd'hui marin au service de la Résistance. Sous couvert de convois de marchandises banales, il faisait transiter informations et clandestins sur les quatre océans du globe. Ce serait lui, peut-être même encore plus que sa propre mère, qu'il serait le plus difficile de décevoir, quand les masques tomberaient. Mais ce serait l'affaire d'un autre lieu, d'un autre temps. Ici, on oubliait les bracelets et les tatouages, les Brunos et les Esadora Carter. Ne restaient plus que le vent, le vert à en devenir daltonien et... les cheveux sauvages.

- Pas cap' d'en attraper un avant moi!

C'était tricher que proposer un tel marché. Il avait des journées d'enfance en guise d'entraînement, Seamus comme le meilleur des entraîneurs et ses clones comme...
Mouais. Peut-être finalement était-il aussi prétentieux que James. Alors que les chevaux détalaient à son approche, il crut deviner la silhouette de Toni sur l'une des créatures. La silhouette s'envola soudain pour disparaître dans l'herbe, faisant courir Jörgen comme un dératé, avec, au coeur de la poitrine, une drôle de pensée passagère. Peut-être serait-il meilleur de mourir maintenant, alors qu'ils étaient libres, un peu, et purs, pas beaucoup plus. Peut-être que souffrir maintenant, pas longtemps, juste le temps de l'inévitable, était moins pire que d'accepter d'être le témoin de ce que l'avenir leur réserverait. L'écho d'un fou-rire effaça jusqu'au souvenir de cette réflexion. Il courut jusqu'à elle, peut-être même encore plus vite et lui tendit une main qu'elle saisit, pour le tirer à elle.
Leurs vêtements étaient verts quand ils se relevèrent et un des chevaux étaient restés pour les observer d'un air ébahi. Ils profitèrent de l'occasion, et sans que leur nouvelle monture ne sache vraiment comment ni pourquoi (sans doute ne connaissait-elle ni la magie, ni les sorciers), ils se retrouvèrent à galoper sur le dos de la créature, un peu folle, un peu ivre. Toni serrée contre lui, Jörgen songea que, finalement, le bonheur devait ressembler à ça. A un soleil qui brillait sur une prairie, avec du rien tout autour.
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